Le renouvellement du vignoble fait partie du cycle de vie naturel d’un domaine viticole. Ainsi, nous avons arraché cette année deux hectares de vigne fatiguée, dont les souches montraient de plus en plus d’irrégularités dans leur production de fruit et de végétal. Pour compenser cette perte, un jeune plantier de Malbec a été mis en place sur une jachère d’éboulis calcaires au-dessus du domaine. Le sol de ce terrain vierge de vigne depuis plus de 20 ans présente l’avantage d’être exempt de maladies virales de la vigne. C’est donc un environnement particulièrement sain qui accueille les jeunes plans. Plantée à 6000 pieds par hectare, une densité de plantation plus élevée que l’exige l’appellation, ces vignes devraient entrer en production au bout de 4 à 5 ans.
La densité de plantation est un facteur important pour l’équilibre du vignoble. Son influence sur la quantité, mais également sur la qualité des raisins produits est grande. Globalement, une densité plus élevée donnera des rendements naturellement faibles par pied et des raisins plus concentrés, goûteux et aromatiques. Néanmoins, il faut veiller sur les terrains pauvres des collines de Bru, à ne pas planter trop de souches par hectare, au risque de trouver la terre dans l’incapacité de nourrir la vigne. Tout est question d’équilibre.
De Vienne à Valence, sur la rive droite du Rhône, se dressent tel un mur de vignes les Côtes du Rhône septentrionaux sur des parcelles et des terrasses granitiques et escarpées : Côte Rôtie, Condrieu, Saint Joseph, Cornas et Saint Péray du nord au sud. Rive gauche, la situation semble moins théâtrale. En tout cas ce qui concerne le vignoble de Crozes Hermitage, la plus grande des AOP du nord, avec une topographie plus sereine et plus vallonnée. Pour y trouver des terrasses et des vignes qui s’accrochent au-dessus des eaux calmes et profondes du Rhône, il faut s’avancer vers la colline d’Hermitage, une des montagnes sacrées du monde vinicole.
La vue est magnifique dans ces vignobles, d’en haut comme d’en bas, côté ciel comme côté fleuve. Et oui, c’est exactement ça : par moment ces vignobles semblent suspendus quelque part entre le grand fleuve tranquille et le ciel bleu clair. On peut d’ailleurs avoir la même impression au palais en dégustant les vins les plus réussis de ces terroirs…
Mais si les vignes se plaisent dans ces lieux à la topographie et géologie peu commune, leur culture demande des efforts supplémentaires aux hommes et femmes. Tandis que dans d’autres parties de la vallée du Rhône le choix entre une culture mécanisée ou plutôt manuelle revient aux exploitants, ici c’est la folie de la nature et du terrain qui s’impose. Construire et entretenir des murettes pour retenir la terre, labourer le sol avec des tracteurs chenille et au treuil, maintenir l’herbe par la pioche, attacher le végétal de chaque pied de vigne à son échalas, transporter l’appareil à traitement sur le dos - tout se fait à la main et avec les pieds, la force des pentes ne laissant que peu de place aux machines.
Il en va évidemment de même pour les vendanges, qui se déroulent habituellement courant septembre et début octobre. Les équipes de vendangeurs montent dans le vignoble à la fraîcheur du matin, d’abord en voiture, mini bus et tracteur, puis à pied. Les coupeurs se déploient dans les rangs et sur les terrasses, tandis que les porteurs font des allers-retours avec leurs hottes sur le dos, afin de cueillir les raisins coupés. Ce travail permet un premier tri de la vendange, avant le transport des raisins à la cave dans des cagettes ou dans des petites bennes. Aux efforts traditionnels des vendangeurs - les éternels vas et viens, les dos courbés, la marche pénible sur les sols caillouteux, le poids du seau plein de raisins - s’ajoutent ici la pente. Parfois fort de 50% ou plus, on la parcours en suivant de petits chemins et des escaliers en pierre entre les terrasses jusqu’aux tracteurs.
Faut-il être fou pour venir et revenir faire les vendanges dans ces vignobles ? Passionné au moins, voir amoureux de cette terre et sa tranquillité, de ces terrasses et leur vue sur la vallée du Rhône, et du vin, bien évidemment. Et vous savez tous que ça aide, l’amour, à rendre les pentes plus douces et les seaux moins lourds, et que ça permet de travailler avec le sourire. Car ceux qui ont déjà fait des vendanges savent, que plus c’est pénible, plus on rit. Au plus tard le soir, les pieds au repos, un verre de syrah à la main…
Sous un ciel bas mais sec, Yves Gras rentre les raisins de ses parcelles les plus précoces à Gigondas et Vacqueyras. Avec concentration et bonne humeur, l’équipe internationale de vendangeurs (Vaucluse, Espagne, Afrique…) tri soigneusement les raisins à la vigne, tandis qu’ Yves se penche sur la benne pour enlever d’éventuels grains abîmés et feuilles tombées dans les seaux. Peu de raisins, mais des raisins juteux et goûteux pour ce millésime 2012, d’ailleurs le premier millésime certifié VIN BIO pour le Domaine Santa Duc, à la vigne comme à la cave.
Les orages fin Septembre ont apporté des pluies plutôt bénéfiques pour les parcelles et cépages tardifs de Santa Duc, dont les raisins seront vendangés dans la première moitié du mois d’octobre.
C’est pour cela que le Mourvèdre et la Syrah dans une moindre mesure occupent aujourd’hui une place importante dans notre vignoble, pour des raisons différentes. Car LA Syrah, un des rares cépages français au prénom féminin, sait apporter des qualités au Grenache dont il se sert volontairement : couleur sombre et mystérieuse, arômes de violette, de framboise et de myrtille, de truffe noire et de tabac blond dans les vins vieillis. Et en bouche c’est avec son élégance incontestable, qu’elle modère parfois la fougue du Grenache.
Le Mourvèdre que nous affectionnons plus particulièrement quant à lui, regarde les deux souvent avec une certaine distance. Plus sérieux, plus discret, c’est un véritable homme de l’ombre dans nos vins, qui sait rester discret, tout en contrôlant l’assemblage. Noir, sombre et confituré dans son fruit, c’est surtout pour sa structure tannique qu’il s’est fait aimer… ou craindre.
Cépage tardif, le Mourvèdre ne se plante pas n’importe où, au risque de ne pas l’emmener à pleine maturité. Dans ce cas, il s’exprime avec grossièreté et rend la vie du vinificateur bien difficile. Mais dans le terroir tardif de Gigondas, le Mourvèdre prend ses aises, aussi bien dans les sols alluviaux des Hautes Garrigues, que sur les hauteurs calcaires des Dentelles de Montmirail. Il apporte droiture et raison à nos vins, tout comme la fraîcheur de ses tanins serrés et fins.
Aramon, Picpoul noir, Aspiran... plantation de vieux cépages !
Permalien, par Pierre Cros
Aujourd’hui, grâce à la prise de conscience de techniciens agricoles qui ont minutieusement sélectionné les bois de ces vieux cépages, nous avons pu mettre en place une jeune vigne d’Aramon, Piquepoul noir et d’Aspiran.
Quelle belle revanche pour ces vieux de la vieille ! Eux que l’on a voulu exterminer au profit de cépages dit « nobles » dans une région où règne de plus en plus l’hérésie d’une viticulture mondialisée au détriment de ses origines.
Quelle belle revanche aussi pour nos Anciens, qui n’étaient pas forcément plus « couillons » que nous et qui avaient compris depuis belle lurette que ces ceps avaient, eux aussi, leur place dans nos terroirs arides. _ Enfin, quelle belle revanche personnelle… Per chez nous, il ne faut pas être en avance sur son temps, car lorsque l’on est trop « précurseur », le temps que la mode arrive, personne – et surtout pas nos décideurs – ne se souvient qu’il y a dix ans, on le faisait déjà.
Alors même si je dérange une fois encore, en étant le seul vigneron en France, à cultiver ce type de vigne expérimentale « hors normes » et même si je suis excessif en tout… je le sais… que les esprits chagrins et les âmes sensibles se rassurent… j’assume…
… et vous donne rendez-vous les samedi 12 et dimanche 13 mai, de 10h à 22h, en compagnie de notre ami Jean-Pierre, éleveur fromagier à la Ferme de Marcou. Il viendra vous faire déguster ses Cantals, St Nectaire… à emporter ou à consommer sur place avec sa charcuterie maison et son échine de porc grillé (10€ l’assiette – réservation souhaitée).
Depuis quelques années le temps et le climat semblent changé. Qu’en est il dans le vignoble de Cahors ?
Pascal Verhaeghe : Nous avons effectivement constaté des changements au niveau de la météo ces dix dernières années. Il y a plus de vent et nous avons des périodes de chaleur et de sècheresse plus fréquentes.
Plus de vent et plus de chaleur, est ce que c’est plutôt bon ou mauvais pour la viticulture ?
PV : Cela dépend. Le vent a tendance à rapidement sécher la vigne après des périodes de pluie. Nous avons donc moins de risque de maladies, les champignons parasites ont plus de mal à s’installer. En ce qui concerne la chaleur et la sècheresse, il faut aider la vigne à s’adapter.
L’aider comment ?
PV : Les amendements organiques, le compost, par exemple augmente la rétention d’eau dans les sols. Mais ce n’est pas tout. Il faut aussi inciter la vigne à pousser ses racines en profondeur, pour se mettre à l’abri.
Comment faites vous au juste pour inciter les racines à descendre ?
PV : Par le travail du sol et par la patience. Depuis de nombreuses années, nous faisons un travail de buttage à l’automne et de décavaillonnage au printemps. C’est à dire, nous couvrons et découvrons les pieds de vigne de terre. En même temps, cela coupe les racines près de la surface, de cette façon la vigne pousse vers le bas. On peut ainsi gagner 20 à 30 centimètres de profondeur racinaire par an.
Quel incident sur les raisins et la maturité ?
PV : Jusqu’à là, nous arrivons à maîtriser une maturation régulière de nos raisins, malgré les aléas climatiques. Il faut à tout prix éviter un arrêt de maturation en période de grandes chaleurs estivales. La vigne ne doit donc pas souffrir et garder son feuillage intact et fonctionnel. Une alimentation régulière en eau en est la clé. De plus, nous tenons le feuillage plus court qu’auparavant pour ralentir l’accumulation des sucres dans les raisins et préserver l’acidité. C’est là qu’on prend des risques, car il faut quand même suffisamment de végétal pour arriver à maturité.
Et vous retrouvez votre travail dans les vins ?
PV : Tout à fait. Au niveau de l’équilibre sucres/acides d’abord. Les degrés restent assez faibles dans nos vins, autour de 13 à 13,5 % Alc. Vol. et nous nous réjouissons de la forte présence de fraîcheur. Et puis les structures tanniques se sont affinées, sans perdre leur force et intensité. C’est de ça que vivent les grands vins rouges : assez d’alcool pour avoir du volume et de la puissance, la fraîcheur pour former une colonne vertébrale et pour donner de la longueur, des tanins pour la profondeur et la longévité.
Merci Pascal.
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